Accueil ▷ Actualités ▷ Actualités
Appel
Date limite de soumission : lundi 22 octobre 2018
Atelier organisé par Thibault Bechini, Emmanuel Falguières, Laurine Manac’h et Gaspard Matton (Paris 1 Panthéon - Sorbonne et EHESS, UMR 8188 - Mondes Américains)
Appel, en français, espagnol et anglais
Format attendu pour les propositions
Source classique de l’histoire sociale, l’archive judiciaire fait aujourd’hui l’objet d’approches historiennes nouvelles. Alors que les archives des juridictions pénales ont souvent été privilégiées par les chercheurs, des travaux récents ont porté un regard neuf sur les archives produites par les justices civile[1], commerciale[2], consulaire[3]et du travail[4]. Cet atelier centré sur « les usages du judiciaire » s’intéresse à la manière dont les historiens mobilisent ces sources à nouveaux frais, tout en éclairant le rapport des justiciables aux différents tribunaux. Ce faisant, l’on s’attachera à exposer le renouvellement des thématiques de recherche et les dialogues possibles entre histoire et sciences sociales du droit. En outre, déplacer la focale d’analyse sur les usages permet d’interroger les usages différenciés que les justiciables font à la fois des diverses juridictions et des documents produits par les tribunaux qui constituent, avec d’autres institutions à différentes échelles, les maillons de « chaînes juridictionnelles[5] » parfois très complexes.
Cet atelier vise à réunir des chercheurs travaillant sur les espaces américains aux époques moderne et contemporaine. Nous souhaitons y faire débattre chercheurs confirmés et doctorants dans une perspective historienne ouverte aux autres sciences sociales – telles l’anthropologie ou la sociologie – autour de trois chantiers : la méthodologie, l’historiographie et enfin des cas d’étude tirés de recherches en cours. A travers la question des « usages du judiciaire », l’atelier vise à produire un état du champ disciplinaire et à proposer des pistes pour les recherches futures.
L’atelier s’organisera autour des modules suivants :
- Module 1. Renouvellements méthodologiques
L’histoire sociale, l’histoire culturelle et l’histoire matérielle ont renouvelé en profondeur l’histoire de la justice et du droit dans les Amériques. Alors que la place centrale du droit, comme « l’une des formes majeures d’ordonnancement du social[6] », est désormais reconnue dans l’ensemble des sciences sociales[7], quelles sont les réinventions méthodologiques et les réflexions menées par ces disciplines sur leurs usages de l’archive judiciaire ? Ce module sera centré sur l’exploitation de nouvelles sources, la réflexion sur leur matérialité[8], la mise en évidence des difficultés rencontrées par l’historien pour se saisir des « dossiers » judiciaires, en matière de traitement et, par conséquent, de méthode de recherche (qualitative, quantitative, etc.). Il espère aussi ouvrir une discussion sur la contribution des humanités numériques à ce renouveau historiographique.
- Module 2. Débat historiographique
Attentif aux problématiques de l’histoire de la justice, des juridictions et des acteurs évoluant dans les espaces judiciaires, ce module s’organisera autour de la discussion de deux ouvrages récents de sciences sociales. Pensé dans une optique hémisphérique, le module fera dialoguer des ouvrages qui portent respectivement sur les aires de l’Amérique du Nord et de l’Amérique latine. Deux chercheurs seront invités à discuter l’état du champ avec, dans la mesure du possible, les auteurs des ouvrages.
- Module 3 : Recherches en cours
Les propositions de communications pourront s’inscrire dans un ou plusieurs des axes suivants :
Axe 1. Usages des documents et des savoirs
Du cheminement de la citation d’huissier aux notifications envoyées à d’autres juridictions et aux réemplois des minutes judiciaires, les documents produits par les tribunaux ne demeurent pas figés. Au contraire, ils passent entre les mains d’acteurs divers – personnel judiciaire, justiciables, décideurs politiques – et témoignent de l’articulation de diverses juridictions et institutions, invitant ainsi à envisager les tribunaux comme les maillons de « chaînes juridictionnelles » plus vastes. Quelles productions de savoirs et de documents permet le judiciaire ? Que dire de leurs circulations et de leurs non-circulations ? Et enfin à quels réemplois ces documents peuvent-ils être soumis par l’administration mais aussi par les justiciables eux-mêmes ?
Axe 2. Usages des espaces
Le judiciaire produit des espaces juridictionnel, judiciaire et social. Les ressources et cultures juridiques[9]contribuent aux usages différenciés et inégaux du judiciaire par les justiciables. Leurs préoccupations et leurs choix invitent à questionner la cohérence des découpages judiciaires. Loin d’une vision systémique de l’entente, les juridictions se révèlent souvent concurrentes, conflictuelles, difficilement coordonnées, notamment dans des contextes de privilèges juridictionnels affirmés. Il s’agira également d’examiner dans quelle mesure les recours aux juridictions contribuent à façonner le territoire vécu des populations.
Enfin, l’étude des usages politiques et sociaux des tribunaux par les magistrats, avocats et autres représentants des justiciables[10], permettra d’interroger le rôle de l’activité judiciaire dans la création d’espaces sociaux et politiques[11].
Les propositions de communications sont ouvertes pour les modules 1 et 3.
[1]Raúl O. FRADKIN (dir.), El poder y la vara. Estudios sobre la justicia y la construcción del estado en el Buenos Aires rural, 1780-1830, Buenos Aires, Prometeo Libros, 2007 ; Antoine FOLLAIN (dir.), Les Justices, locales. Dans les villes et villages du XVe au XIXème siècle, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2006 ; Jean-Claude FARCY, « Les archives méconnues de la justice civile », dans Frédéric CHAUVAUD, Jacques-Guy PETIT (dir.), L’histoire contemporaine et les archives judiciaires (1800-1939), Paris, Honoré Champion, 1998, p. 397-408 ; Hervé PIANT, « Des procès innombrables. Éléments méthodologiques pour une histoire de la justice civile d’Ancien Régime », Histoire & mesure, vol. 22, n°2, 2007, p. 13-38.
[2]Sur l’Amérique hispanique, voir Jeremy ADELMAN, Republic of Capital. Buenos Aires and the Legal Transformation of the Atlantic World, Stanford, Stanford University Press, 1999. Sur l’Europe, voir Amalia KESSLER, A Revolution in Commerce : The Parisian Merchant Court and the Rise of Commercial Society in Eighteenth-Century France, Yale University Press, 2007 ; Claire LEMERCIER, « Un modèle français de jugement des pairs. Les tribunaux de commerce, 1790-1880 », Habilitation à diriger des recherches en Histoire, Université Paris VIII Vincennes-Saint Denis, 2012 ; Guillaume CALAFAT, « Une mer jalousée. Juridictions maritimes, ports francs et régulation du commerce en Méditerranée (1590-1740) », thèse de doctorat en histoire sous la codirection de Franco Angiolini et Wolfgang Kaiser, Paris/Pise, Université Paris 1 – Panthéon Sorbonne/Università di Pisa, 2013.
[3]A. BARTOLOMEI, G. CALAFAT, M. GRENET et J. ULBERT (dir.), De l’utilité commerciale des consuls. L’institution consulaire et les marchands dans le monde méditerranéen (XVIIe-XXe siècles), Rome-Madrid, Publications de l’École française de Rome-Casa de Velázquez, 2017.
[4]Juan Manuel PALACIO, Leon FINK, Labor Justice across the Americas, Urbana, University of Illinois Press, 2017.
[5]Arnaud BARTOLOMEI, « Introduction », dans op. cit. BARTOLOMEI, CALAFAT, GRENET, et al. (dir.), 2017.
[6]Baupoin DUPRET, Droit et sciences sociales, Paris, Armand Colin, 2006.
[7]Laurence GUIGNARD, Gilles MALANDAIN, « Introduction : usages du droit dans l’historiographie du XIXe siècle », Revue d’Histoire du 19ème siècle, n° 48, 2014 ; Austin SARAT, « “The Law is all over” : Power, Resistance and the legal consciousness of the welfare poor », Yale Journal of Law and the Humanities, Vol. 2, 1990.
[8]Voir entres autres, Aude ARGOUSE,Je le dis pour mémoire. Testaments d’Indiens : lieux d’une justice ordinaire (Cajamarca, Pérou, XVIIe siècle), Paris, Les Indes Savantes, 2016.
[9]Marie HOULLEMARE, « Legal Culture », Oxford Bibliographies in Atlantic History, Trevor Burnard (dir.), New York, Oxford University Press, 2016.
[10]Juan Carlos GARAVAGLIA, « Alcaldes de la Hermandad et juges de paix à Buenos Aires (XVIIIe-XIXesiècle) », Etudes rurales, n°149-150, 1999, p. 99-110 ; María Rosa PUGLIESE, De la justicia lega a la justicia letrada. Abogados y asesores en el Río de la Plata, 1776-1821, Buenos Aires, Junta de Estudios Históricos de San José de Flores, 2000.
[11]Voir les travaux de Tamar HERZOG, pour une étude renouvelée de la justice pénale : La administración como un fenónemo social : la justicia penal penal de la ciudad de Quito (1650-1750), Madrid, Centro de Estudios Constitucionales, 1995.
Colloque
Du 9 au 11 octobre 2019
Page créée le mercredi 26 septembre 2018, par Dominique Taurisson-Mouret.