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Colloque
28-29 novembre 2024 (Université Polytechnique Hauts-de-France (UPHF-Valenciennes))
Samedi 31 août 2024
À l’heure où de nouvelles normes environnementales sont définies, où les ressources naturelles sont l’objet de discussions très vives, il semble important de réinterroger la question en l’inscrivant dans la longue durée, en étant attentif aux transformations, aux continuités et discontinuités, aux accélérations ou stagnations, aux seuils de réversibilité dans l’exploitation des ressources. Ces rencontres s’intéressent plus spécifiquement à la place qu’ont les ressources naturelles, et pas seulement énergétiques, dans ces rythmes de développement et d’évolution dans le contexte du temps long de l’Europe occidentale et du pourtour méditerranéen jusqu’au XIXe siècle.
Le groupe de recherche « Sociétés-Environnement » fondé à Liessies en 2007 sous le double patronage de l’Université de Valenciennes et du Conseil Général du Nord termine le cycle « Ressources naturelles, concepts, usages et pratiques », ouvert avec une première rencontre sur Pouvoirs et ressources naturelles et préparé par un atelier transition en 2023.
Rassemblant des chercheurs issus d’horizons disciplinaires différents, ce cycle entend explorer la question des ressources naturelles relatives à l’agriculture, la sylviculture, la pêche, l’artisanat ou encore l’industrie et l’énergie. À l’heure où de nouvelles normes environnementales sont définies, où les ressources naturelles sont l’objet de discussions très vives, il semble important de réinterroger la question en l’inscrivant dans la longue durée, en étant attentif aux transformations, aux continuités et discontinuités, aux accélérations ou stagnations, aux seuils de réversibilité dans l’exploitation des ressources. Ces deuxièmes rencontres portent tout particulièrement sur les transitions historiques[1].
C’est un thème qui connait ces toutes dernières années un regain d’attention à l’échelle planétaire. Le Dictionnaire de la pensée écologique présente deux définitions de la « transition », reflet des débats actuels autour de ce terme[2]. Le premier affirme la dimension téléologique de la transition écologique, comme avenir inéluctable si l’humanité veut échapper au chaos des dérèglements qu’elle a déclenchés. Le second replace la transition dans le champ des sciences humaines, comme outil d’analyse de mécanismes de tous ordres (démographie, politique, économie…) avec des étapes et des champs d’application[3]. La transition s’apparent à une modification structurelle profonde des modes de production et de consommation des ressources naturelles.
Elle est considérée aujourd’hui essentiellement à travers la consommation des énergies, comme les débats nationaux décentralisés à la suite du Grenelle de l’environnement l’ont montré dans les années 2010. En cela, elle ne constitue qu’un des volets de la transition écologique, concept élaboré par Rob Hopkins[4]. L’idée de « transition énergétique » est apparue au milieu des années 1970 pour atténuer l’impact psychologique de la « crise énergétique » de la fin annoncée des énergies fossiles, et proposer une alternative pour préserver la croissance économique. Dire « transition » plutôt que « crise » rend le futur moins anxiogène tout en donnant l’impression d’un gestion maîtrisée des changements qui s’imposent. Jean-Baptiste Fressoz rappelle toutefois qu’« il n’y a en fait jamais eu de transition énergétique… L’histoire de l’énergie n’est pas celle de transitions, mais celle d’additions successives de nouvelles sources d’énergie primaire. L’erreur de perspective tient à la confusion entre relatif et absolu, entre local et global[5] ». Pour se libérer de l’idée de transition, l’histoire de l’énergie doit abandonner ses terrains classiques et étudier les situations historiques passées, où des sociétés ont été contraintes de modifier leur consommation de ressources. Car c’est aussi les préoccupations liées à l’accès à l’eau potable et, dans les industries de hautes technologies, aux métaux rares, ce qui hypothèque déjà les nouvelles économies et les sociétés d’avenir. La transition se fait crise de civilisation suscitant deux réactions opposées, la recherche d’un monde d’avant et la fuite en avant sans se préoccuper de ce que sera l’existence des générations futures.
Ce deuxième volet s’intéresse plus spécifiquement à la place qu’ont les ressources naturelles, et pas seulement énergétiques, dans ces rythmes de développement et d’évolution dans le contexte du temps long de l’Europe occidentale et du pourtour méditerranéen jusqu’au XIXe siècle.
Trois grands axes encadrent les approches qui peuvent être proposées :
Il y a indéniablement un problème de définition de l’objet dont le sens moderne ne convient certainement pas aux situations passées. A travers les sources historiques, mais aussi la perception du phénomène que peut nous donner à voir les analyses archéologiques de l’emprise sur les ressources, il est nécessaire de définir pour chaque période, les limites d’usage de la notion. Doivent être questionnés également les sens compris par les différentes sciences qui investissent ce champ d’étude. Qu’est-ce que la transition ? Y a-t-il une définition propre aux historiens, aux géographes, aux économistes, aux écologistes ?
La temporalité des transitions se discute aussi. Une grande transition ne peut pas être analysée de la même manière selon les échelles de temps considérées et le degré de précision des données et des datations. Lorsque nous comparons les différentes périodes, non seulement elle interroge les terminologies attachées à la « grande transition », mais elle questionne aussi les différentes méthodologies que nous mettons en œuvre[6].
Les transitions sont à l’échelle de civilisations, mais aussi durant leur histoire. Elles accompagnent leur émergence ou provoquent leur disparition. Il y a toute une typologie de transitions caractérisée par la durée et l’emprise du phénomène : trends/ruptures majeures, événement/mouvement lent. En économie, la transition est une « substance philosophique » qui fait toujours appel à la notion de temps long. C’est un phénomène doux, sinon on parlera de crise. Quels sont les rythmes ? A quelle vitesse ? Est-ce toujours une situation irréversible ? La transition dans l’exploitation des ressources naturelles se pense souvent en termes d’érosion, d’épuisement de la ressource jusqu’à sa disparition. C’est en tout cas un phénomène non-naturel, lié à la forte anthropisation du milieu. La discrétisation (découper le temps en petites périodes) est complexe car la transition est un phénomène dynamique défini par un état initial et un état final. Que se passe-t-il entre les deux ? Il faut chercher un état de référence, ce qui est presque impossible tant les synergies sont multiples (mono-exploitation ou, plus souvent, corpus de ressources naturelles), emboîtent les temporalités, dans un système co-évolutif.
C’est enfin la prise de conscience du changement par les sociétés qu’il faut questionner. On a trop vite fait de parler de crise, de résilience, en plaquant des concepts développés assez récemment dans l’histoire humaine et dans la pensée économique. Mais comment sont perçues (ou pas du tout) des modifications dans l’exploitation des ressources et leur épuisement ? Les sociétés sont-elles actrices de ces changements ou bien tout est laissé à l’initiative du pouvoir ? Les réponses politiques et les réponses sociales sont-elles consécutives ou simultanées ? La première lecture des temps de transitions est péjorative. Elle est nourrie par un affect intimement lié à la culture qui la subit. Car l’exploitation d’une ressource naturelle comporte bien sûr une valeur économique (hiérarchie de richesse), mais aussi une valeur politique (capacité de contraindre et de discriminer dans les communautés) et sociale (représentation, prestige, distinction sociale, interdit religieux…) Paradoxalement, l’épuisement des ressources ne signifie pas affaiblissement d’une économie ; et un développement économique peut être lié à l’extinction d’une ressource. Car les innovations techniques permettent un accès aux ressources, en accélère l’exploitation, et l’épuise rapidement.
Modalités de soumission
Les propositions de communications et de posters devront comporter un titre court et suggestif, 5 mots-clés et un argumentaire (3000 signes espaces comprises présentés en une page sous fichier word de préférence, ou pdf), jalonné éventuellement par quelques intertitres courts et explicites. L’auteur doit indiquer ses coordonnées (courriel, téléphone, coordonnées postales) et son établissement ou laboratoire de rattachement.
Ces propositions sont à adresser en précisant l’objet Transition à fabrice.guizard chez uphf.fr au plus tard le 31 août 2024
Les auteurs seront avisés du résultat des séléctions à la fin du mois de septembre 2024.
Des précisions seront alors données sur l’organisation matérielle du colloque.
Les rencontres ne prennent en charge que l’hébergement et la restauration des communicants (si plusieurs auteurs, un par communication).
Les communications d’une durée de 25 mn et les posters présentés en session seront publiés, après avis du comité scientifique, au deuxième semestre 2025. Il conviendra donc de respecter scrupuleusement les normes éditoriales et la date ultime de remise des manuscrits.
Comité scientifique
Adrien Bayard (Université d’Artois)
Corinne Beck (UPHF)
Jérome Buridant (Université de Picardie Jules Verne)
Fulgence Delleaux (UNamur)
Anne Fournier (Université Gustave Eiffel Marne-la-Vallée)
Marc Galochet (UPHF)
Fabrice Guizard (UPHF)
Patrice Herbin (Service Archéologie et Patrimoine du Département Nord)
Gilles Leroy (DRAC)
Pierre-Gil Salvador (ULille)
Notes
[1] Cf. pour une première réflexion, Christel Müller, Monica Heintz (dir.), Transitions historiques, Paris, De boccard, 2016.
[2] Dominique Bourg, Alain Papaux (dir.), Dictionnaire de la pensée écologique, Paris, PUF, octobre 2015.
[3] Voir par exemple le colloque de Liège janvier 2018, en collaboration avec les universités d’Amiens et de Tours consacré à « Transition(s) : concept, méthodes et études de cas (XIVe-XVIIe s) ». Et en géographie, cf. Lydia Coudroy de Lille, Anne Rivière-Honegger, Lisa Rolland, Anaïs Volin, « Transition », Géoconfluences, rubrique « notion en débat », février 2017. URL : http://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/a-la-une/notion-a-la-une/notion-transition.
[4] Rob Hopkins, Manuel de Transition : de la dépendance au pétrole à la résilience locale (trad. de l’anglais), Montréal/Escalquens, Les Éditions Écosociété, 2010.
[5] Jean-Baptiste Fressoz,« Pour une histoire désorientée de l’énergie », Entropia-Revue d’étude théorique et politique de la décroissance, 15, 2013.
[6] Cf. Geoffroy de Saulieu, Marie-Hélène Moncel, « Archéologie et grande transition », Nouvelles de l’archéologie, p. 5-6. https://doi.org/10.4000/nda.10301
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