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Appel
Date limite de soumission : mercredi 31 janvier 2024
Colloque organisé à Rabat par le projet TariMa – Ecrire l’histoire au Maghreb aux périodes moderne et contemporaine (financement CollEx-Persée 2022-2024) dans ses versions française, arabe et anglaise
Coordination de l’organisation : Antoine Perrier (CNRS, Centre Jacques Berque), antoine.perrier chez sciencespo.fr
Appel à retrouver sur le site du Centre Jacques Berque et celui de la Bulac dans les trois langues
Lieu : Rabat
Date : 10-11 juin 2024
Présentation générale et contexte
Vingt après le colloque intitulé « Écritures de l’histoire du Maghreb » (El-Moudden et al., 2007), le projet TariMa – Ecrire l’histoire au Maghreb aux périodes moderne et contemporaine (financement CollEx-Persée 2022-2024), le Centre Jacques Berque et ses partenaires organisent la tenue d’une nouvelle rencontre scientifique internationale sur l’historiographie maghrébine de langue arabe. Tandis que le colloque de 2004 dressait le bilan d’une production historique maghrébine renouvelée après les indépendances, en organisant ses réflexions autour des identités nationales et de la mémoire collective, cette nouvelle rencontre voudrait mettre en relief une historiographie se référant à une tradition savante plus ancienne. Celle-ci repose sur des genres d’écriture et une méthode dont s’emparent, depuis la période médiévale jusqu’au XXe siècle, les auteurs de chroniques (aẖbār), dictionnaires (ṭabaqāt), hagiographies (manāqib), généalogies (ansāb), compilations de sources, descriptions géographiques (ẖiṭaṭ) et récits de voyage (riḥla). Au-delà d’une division rigide en genres déterminés, ce colloque propose d’étudier le projet historiographique des auteurs, en s’intéressant au contexte, au contenu et à la matérialité de ces œuvres.
Depuis les ouvrages des orientalistes de la période coloniale, notamment au Maroc (Lévi-Provençal, 1922), les études spécifiquement consacrées à ces historiens et leur écriture ont été peu nombreuses au Maghreb (Ibn Sūdā, 1960, Abdesselem, 1973) ou en France (Berque, 1978). Ces travaux restent parfois empreints de la tonalité négative des premiers écrits français : ils rappellent l’indignité du récit historique (ta’rīẖ) dans la hiérarchie des sciences, le caractère répétitif de l’écriture et le remploi systématique de matériaux de seconde main. Depuis l’Europe, la connaissance de ces sources essentielles à l’histoire du Maghreb reste limitée et résumée à quelques auteurs privilégiés, jouissant de rares traductions en français ou en langues européennes.
Ce colloque voudrait saisir l’occasion d’un nouveau contexte : sur un plan épistémologique, de nouveaux modes de lecture, inspirés de l’anthropologie historique, ont renouvelé l’approche de ces documents, en prêtant attention à leurs dimensions matérielles et codicologiques. Ces œuvres jouissent ainsi du renouvellement des sciences du manuscrits : le Maghreb connaît ces vingt dernières années une intense activité dans la publication d’éditions critiques (taḥqīq) de sources inédites. Celles-ci, désormais mieux connues, circulent davantage dans les librairies du Maghreb et au-delà sur internet. La numérisation massive de manuscrits dans les bibliothèques internationales et maghrébines s’ajoute à la présence en ligne de copies numériques de ces éditions, ouvrant la possibilité de nouveaux usages en humanités numériques. Enfin, la recherche internationale a paru répondre de manière plus engagée à l’appel des historiens maghrébins lancé dans les années 1960, en faveur du recours aux sources locales et non plus seulement européennes pour écrire l’histoire du Maghreb.
Objectifs du colloque
Ce colloque voudrait contribuer à replacer le Maghreb dans les études sur l’historiographie arabe, généralement centrées sur l’Orient, la contribution nord-africaine étant envisagée à titre accessoire, à l’exception d’Ibn Khaldūn. Il propose aussi aux chercheurs de mettre en valeur des auteurs et des œuvres de tout genre pour servir les renouvellements de l’histoire du Maghreb. Son vaste cadre chronologique propose de réunir médiévistes, modernistes et contemporanéistes, trop souvent séparés : tout en se penchant sur l’intense production médiévale, le colloque sera l’occasion de souligner les continuités de ces genres pour la période moderne, parent pauvre des études sur la région, et la période coloniale, souvent étudiée à partir de sources francophones.
Cette manifestation souhaite mettre en avant les différentes façons d’écrire l’histoire au Maghreb, en partant des textes eux-mêmes : du contexte d’écriture aux procédés narratifs employés par les auteurs, de la fabrication d’un manuscrit à sa diffusion au format numérique, ce colloque voudrait mettre en valeur la dimension historique d’une large gamme de récits parfois rangés dans des genres différents (annalistique, biographique, généalogique, hagiographique…). Il voudrait également offrir la possibilité aux différents acteurs travaillant sur ces œuvres (historiens, philologues, éditeurs scientifiques, traducteurs) de se rencontrer autour de problématiques communes.
Axes et périmètre des communications
Les communications proposées pourront saisir un ou plusieurs des thèmes suivants, empruntés à un axe ou à plusieurs, du moment qu’elles rendent compte d’un travail sur un ou plusieurs manuscrit(s) ou texte(s) dans une langue locale (arabe littéral ou vernaculaire, amazigh, hassani…) :
composé(s) entre la période médiévale et le XXe siècle,
dans un des pays du Maghreb (Mauritanie, Maroc, Algérie, Tunisie, Libye)
comportant une part, majoritaire ou non, de narration historique ou de projet mémoriel.
Aboutissement d’un projet portant sur les manuscrits et les humanités numériques, ce colloque encourage la prise en compte, dans les contributions, des nouvelles approches techniques de ces textes (lexicométrie, traitement automatique des langues, numérisation et reconnaissance des écritures, etc.), sans aucune obligation.
1. Les auteurs et leur contexte : identité sociale, projet personnel et rapport aux pouvoirs
Dans la perspective proposée par Konrad Hirschler (2006) d’associer étude du contexte social et dimensions littéraires pour dégager l’agency des auteurs, cet axe intégrera les points suivants :
La biographie et les milieux dont sont issus ces auteurs, la figure connue de l’historien de cour, des savants des villes aux érudits locaux, pour souligner la variété des lieux d’origine de ceux qui s’emparent d’un genre resté assez libre.
Les interactions entre les textes et leur environnement culturel, les débats ou les questions qui les ont engendrés, l’influence de traditions confrériques, juridiques ou dynastiques, le rôle des évènements sur leur écriture et le choix de leur forme, la popularité de certains types de récits, comme les besoins de récapitulation en temps de crises (Shaztmiller, 1982), les héritages maintenus du genre de la sīra ou de la littérature de ḥadīṯ issus de l’islam classique ou les formes de ruptures et d’invention de procédés.
Les rôles politiques de ces œuvres : entreprises dynastiques, défense d’un groupe social, légitimation généalogique, constitution de preuves juridiques, affirmation de l’autonomie d’une région, promotion d’une doctrine religieuse ou d’une confrérie.
2. L’écriture : narration, sources et théories de l’histoire
Cet axe se penche sur le récit lui-même à travers l’analyse des procédés narratifs, à partir des points suivants :
L’écriture de l’évènement, le statut et la définition des unités narratives (ẖabar), celui des digressions ou des anecdotes, la hiérarchisation et la disposition des faits, la présence du surnaturel ou du miraculeux.
La dimension littéraire des textes : analyse du style, présence de la versification, tous procédés littéraires et leur influence sur la mise en forme de l’information historique.
Le rapport aux sources et l’intertextualité : compilation et citation de sources documentaires (Bora, 2019) ou d’autres auteurs, coupe, falsification ou réarrangement des faits, qualité de l’information historique.
L’analyse de l’empreinte personnelle des auteurs sera particulièrement valorisée dans une littérature qu’on a dit souvent factuelle et d’apparence objective. Celle-ci peut se traduire par une interprétation générale de l’histoire : analyse des moteurs de l’histoire, choix de cadre chronologique (continuité ou rupture entre dynasties ou périodes), et géographique (cadre national, place des empires ou des rapports avec l’étranger).
Le caractère hybride de genres parfois séparés artificiellement et les imbrications entre l’histoire, la généalogie, la biographie, l’hagiographie (al-Qablī, 1998) ; le lien entre la forme même de la narration et la théorie de l’histoire qui en découle (al-Qadi, 1995)
3. Textes et manuscrits : conservation, édition et humanités numériques
Un dernier axe de réflexion portera sur la dimension matérielle des textes et leur rapport avec les corpus archivistiques, en évoquant :
La conservation de ces manuscrits au long des périodes, leur répartition dans les bibliothèques maghrébines et étrangères, la constitution de collections publiques et privées au Maghreb.
Les pratiques de l’édition scientifique dans la variété de leur contexte : la formation au travail d’édition au Maghreb, ses conditions d’exercice (cadre universitaire, projet bénévole, entreprise de publication officielle), les enjeux linguistiques et codicologiques de ces éditions, les politiques éditoriales.
Les atouts et les limites que représentent les humanités numériques : la préservation de ces textes par la numérisation, leur diffusion sur internet, les expériences d’extraction automatique de texte ou de traitement de leur contenu (lexicométrie, traitement automatique des langues…)
Modalités pratiques
Les propositions de communication doivent être adressées à colloque.historiographie.maghreb@gm... avant le 31 janvier 2024, comprenant :
Titre et résumé d’environ une page
Nom, prénom, affiliation et fonction de l’auteur
Adresse mail de contact
Elles peuvent être rédigées en arabe, en français ou en anglais. Les participants retenus seront prévenus au mois de février. Les frais de participation seront pris en charge par les organisateurs dans la mesure de leurs moyens.
Un projet de publication sera soumis aux participants à l’issue du colloque.
Le colloque sera trilingue (français-arabe-anglais).
Colloque
10-11 juin 2024 (Centre Jacques Berque, Rabat, Maroc)
Lundi 10 juin 2024
9h : Accueil
9h15 : Mot d’introduction
9h30-12h30 : Récit des origines et construction des communautés politiques
Mohamed Benabbes (Université de Tunis)
سردية الفتح أو تاريخ المغارب في العصر الوسيط المبكر
Jafar Ben el Haj Soulami (Université Abdelmalek Essaâdi, Tétouan)
اَلأدارِسَةُ الأَوائل : مِنَ التّاريخِ إلى الأُسطورة
Houssem Edine Chachia (Université de Tunis)
التأريخ للجماعة : البعد التاريخي في كتابات الموريسكيين
Charlotte Courreye (Université de Lyon 3)
Abû-l-Qâsim Sa‘dallâh, une histoire « arabisée » en Algérie contemporaine
14h-16h : Narration de l’histoire et fait dynastique : autour de la chronique
Ayşe Kara (Istanbul Medeniyet University)
Reading Between Dynasties : Al-Zāyyānī’s Comparative Historiography of the
ʿAlawī Dynasty and the Ottoman Empire in Bustān al-Zarīf
Isabelle Grangaud (CNRS, CNE, Marseille), Alain Messaoudi (Université de Nantes)
Écrire l’histoire de Sâlah bey, gouverneur de Constantine (1771-1792) : Enquête sur la production d’une chronique.
Salma Hargal (Université de Lille)
Tuḥfat al-zāʾir (1904) : enquête sur un récit national algérien
16h30-18h30 : Les méthodes des historiens, entre subjectivité, citation et vérification des faits
Ahmed El Bahi (Université de Kairouan)
إشكالية النقل في كتب الطبقات المالكية المغربية : تصرّف ابن ناجي في كتاب ابن الدبّاغ نموذجا
Natalie Kraneiß (Université de Münster)
Verification (taḥqīq) as a New Method for 17th Century Genealogists ? ʿAbd al-Qādir al- Jīlānī (d. 1166) and His Descendants in the Western Maghreb as a Case Study
Mohamed Reda Boudchar (Université Abdelmalek Essaâdi Tétouan)
الكتابة التاريخية المغربية والخطاب الصوفي : عمدة الراوين في تاريخ تطاوين لأحمد الرهوني نموذجا
Mardi 11 juin 2024
9h30-11h : Histoire locale et sources orales
Abdelhamid Faiz (Université Ibn Tofail, Kénitra)
في منهجية دراسة المرويّات الشفوية والمدونة في موريتانيا بين القرنين السابع عشر والتاسع عشر.
نحو أنثروبولوجيا تاريخية لتأويل المرويات المحليّة.
Ahmed Noureddine Benali (Université Abdelmalek Essaâdi, Tétouan)
The Rif War Through Riffian Eyes : Revisiting Memoirs, Testimonies, and Local Histories
11h30-13h : La littérature de voyage comme genre historique
Lotfi Ben Miled (Université de la Manouba, Tunis)
ابن خليل مؤرخا لجوانب من تاريخ افريقية الحفصية. الثلث الأخير من القرن 9هـ/15م
Saleh Otman Abu al-Khayr (Université de Ben Ghazi)
التجربة الليبية في أدب الرحلات. الدر الفريد الوهاج بالرحلة المنيرة من الجغبوب إلى التاج، للسيد أحمد الشريف السنوسي : أنموذجاً
Ahmed Elmnounadi (IRCAM, Rabat)
نصوص الرحلة بين الأدب والتاريخ، قراءة في نماذج مغربية
14h30-17h30 : L’usage de l’histoire chez les juristes
Élise Voguet (CNRS, IRHT, Aubervilliers)
Ibn Hilāl al-Sijilmāsī, précurseur d’une jurisprudence oasienne (XVe siècle).
Janina Safran (Penn State University)
A Fifteenth Century Tunisian Jurist’s Use of History : al-Burzuli’s Integration of Legal and Historical Interpretation
Irene Vicente López De Arenosa (Université Autonome de Barcelone, ILC-CSIC, Madrid)
Le contexte historique d’une fatwā recueillie par le juriste malikite ʿAbd al-ʿAzīz ibn al-Ḥasan al-Zayyātī (d. 1055/1645).
Ismaïl Warscheid (CNRS, IRHT, Aubervilliers)
Lectures juridiques du passé : comment les fuqahā’ pensent l’histoire (Ouest saharien, XVIIIe/XIXe siècle)
17h30 : Conclusions du colloque
Entrée libre dans la limite des places disponibles.
Il est possible d’assister au colloque en ligne en s’inscrivant préalablement auprès de secretariat chez cjb.ma
Coordination de l’organisation : Antoine Perrier (CNRS, Centre Jacques Berque)
Comité scientifique :
Sami Bargaoui, Université de la Manouba, Tunisie
Jaafar Ben El Haj Soulami, Université Abdelmalek Essaâdi de Tétouan, Maroc
Rahal Boubrik, Université Mohammed V de Rabat, Maroc
Isabelle Grangaud, CNRS, France
Catherine Mayeur-Jaouen, Sorbonne Université, France
Leila Maziane, Université Hassan II de Casablanca, Maroc
Elise Voguet, CNRS, France
Ismaïl Warscheid, CNRS, France
Ce colloque est organisé par le projet TariMa (« Tārīẖ al-Maġrib - Écrire l’histoire au Maghreb aux périodes moderne et contemporaine (XVIe-XXe siècles ») financé par le GIS CollEx-Persée et porté par la BULAC, en partenariat avec la MMSH, l’IREMAM et le Centre Jacques Berque.
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