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Appel à contribution pour la revue Espaces et sociétés : « Biens communs et territoires »

On observe aujourd’hui une recrudescence d’initiatives fondées sur le concept de « biens communs »dans le contexte de l’aménagement, de l’urbanisme, et du développement des territoires (Urbanisme, 2014). Renvoyant au « bien commun » (au singulier) de la philosophie politique (Thomas d’Aquin), aux « biens communs » (au pluriel) de l’économie publique tout d’abord, puis aux « common pool resources » de l’économie institutionnaliste avec les travaux nobélisés d’Elinor Ostrom, ce concept trouve aujourd’hui un regain d’intérêt. Ces « biens communs », à savoir ces objets à l’usage partagé (l’exclusion en est difficile) et à la gestion en tout ou partie menée par un collectif ou une communauté d’usagers considérés ou auto-déclarés comme légitimes, mobilisent non seulement la communauté scientifique, comme en témoignent les récents ouvrages faisant déjà référence (Coriat, 2015 ; Dardot et Laval, 2014) ainsi que des manifestations scientifiques dédiées, mais aussi les acteurs du développement local au travers de nombreuses initiatives, séminaires, colloques et journées.

La notion est utilisée pour (re)formuler ou (ré)interpréter un certain nombre de problématiques auxquelles sont confrontés différents types de territoires, qu’ils soient caractérisés comme urbains, péri-urbains ou ruraux, à des échelles variées. Des exemples en sont donnés par la transition énergétique avec ses formes de gestion décentralisée, l’aménagement participatif des espaces publics, le développement de l’économie circulaire ou par la redécouverte des vertus des coopératives de logements comme réponse communautaire aux déficits de l’offre aussi bien publique que privée. On peut également citer le déploiement des creative commons, de l’économie sociale et solidaire et de l’économie collaborative qui produisent et mobilisent de manière intensive des biens communs (données urbaines, cadastre en milieu rural, etc.) et qui interrogent l’organisation des territoires en termes de mobilité, accueil de personnes, usages touristiques, entre autres).

Plus particulièrement, le concept de biens communs, s’inspirant de la conception anglo-saxone de la propriété en termes de « faisceaux de droits » (bundle of rights), incite à une ré-interrogation en profondeur – considérée comme salutaire – du régime de propriété privative hérité de la Révolution française et consacré, notamment, dans les codes civils napoléoniens d’Europe continentale. La remise en cause de cette définition relativement rigide de la propriété privative se trouve empiriquement renforcée par le constat de la difficulté de cette dernière à réguler les usages de nombreuses ressources territoriales ou environnementales comme le paysage, la biodiversité, certains types d’espaces publics, le vent, etc., ou comme les nouveaux usages (p. ex. biotechnologiques) des ressources génétiques.

Parallèlement, l’observation des formes empiriques de gestion communautaire de ces biens montre que nombre d’entre elles correspondent en fait à la constitution non pas de « biens communs », mais bien plutôt de « biens de clubs », soit à une appropriation collective sélective, voire exclusive ou, dans le meilleur des cas, à des situations de « clubs ouverts » (open clubs), ce qui pose bien évidemment des problèmes d’équité, tant en ce qui concerne l’accès aux ressources, que le partage des avantages (économiques ou symboliques) qui en sont tirés (Nahrath, 2015).

C’est pourquoi la notion de biens communs mérite d’être interrogée, voire critiquée et mise en perspective, à l’heure où elle est convoquée dans l’aménagement et le développement territorial, souvent pour symboliser une alternative au système de régulation économique dominant, ouvrant la voie vers un développement meilleur (plus durable, plus participatif, etc.). En quoi le concept renouvelle-t-il les approches en termes d’aménagement ou de développement territorial ? Que révèle son usage à propos de notre société, de l’évolution des approches de la gestion des ressources communes et des territoires ? Quelles sont ses implications en termes de gouvernance, d’inégalités ou dans d’autres domaines encore ?

Références bibliographiques

Coriat, B. 2015. Le retour des communs : la crise de l’idéologie propriétaire, Paris, Éditions Les Liens qui libèrent.

Dardot, P. et Laval, C. 2015. Commun : essai sur la révolution au xxie siècle, Paris, La Découverte.

Nahrath, S. 2015. « Bien commun » dans D. Bourg et A. Papaux (sous la dir. de), Dictionnaire de la pensée écologique, Paris, Presses universitaires de France.

Urbanisme 2014. À la recherche du bien commun territorial, no 52 HS.


Page créée le mardi 28 mars 2017, par Dominique Taurisson-Mouret.


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